Aujourd’hui, comme chaque 22 avril, nous célébrons la Journée mondiale de la Terre. Initiée par le sénateur américain Gaylord Nelson en 1970, cette journée a été créée pour sensibiliser le monde entier à la protection de l’environnement. En cette période particulière de confinement, la Terre est plus que jamais au cœur des enjeux économiques et écologiques actuels.
Bonjour la Terre, comment vas-tu ?
“Ma foi, plutôt mieux !” nous souffle t-elle dans le coin de l’oreille. La planète tourne au ralenti depuis maintenant plusieurs semaines, une bouffée d’oxygène qui lui fait du bien. Partout dans le monde, une réduction des émissions de gaz à effet de serre a été observée : En Europe, d’après une étude réalisée par le cabinet de conseil français Sia Partners, chaque jour de confinement se solde par une diminution de 58 % des émissions de CO2. Les secteurs les plus concernés par cette baisse drastique de dioxyde de carbone sont ceux des transports et de l’industrie. Selon Charlotte de Lorgeril de Sia Partners, cette réduction importante des émissions représente “une baisse d’une ampleur jamais encore constatée en Europe”. Dans le reste du monde, même constatation : en Chine – l’un des pays les plus pollueurs et pollués du monde – les émissions de gaz à effet de serre ont nettement diminué entre début 2019 et début 2020. La Terre reprend son souffle !
Elle s’exprime aussi… Mais différemment ! En tant normal, les activités humaines et les phénomènes naturels provoquent de nombreuses vibrations du sol. Depuis le début du confinement, plusieurs experts ont observé une diminution des bruits sismiques : c’est le cas à Bruxelles, où l’Observatoire royal de Belgique a noté une chute de 30 à 50 % de ces bruits. À Paris, ils ont diminué de 38 % depuis la mise en place du confinement, selon l’Institut de physique du globe. À Los Angeles aussi, les experts ont constaté une importante baisse des bruits sismiques. La Terre mise au silence permet aux sismologues de mieux entendre ses chuchotements et même “de révéler des petits événements sismiques non observables auparavant, à cause du bruit élevé” confie Claudio Satriano (sismologue à l’Institut de physique du globe de Paris) au Monde. L’occasion pour ces experts d’écouter la Terre de manière plus précise, pour comprendre certains phénomènes naturels encore inconnus ! Quant à la biodiversité, apaisée, elle s’aventure en terre inconnue dans plusieurs endroits du monde. Confinement pour les uns, liberté pour les autres !
La Terre respire, mais après ?
Si la Terre reprend des couleurs depuis quelques semaines, l’épidémie ne lui apporte pas que du bon. Plusieurs évènements majeurs – tels que la COP15 de la Convention des Nations unies sur la biodiversité collective, le Congrès mondial pour la nature ou le sommet de l’ONU sur les Océans – ont été reportés à l’année prochaine. La 26e conférence mondiale des Nations unies sur le climat, qui doit se tenir à Glasgow en novembre, est en suspens. Cette épidémie ralentit les prises de décisions écologiques. De plus, de nombreux experts avertissent sur le retentissement de cette crise sanitaire sur l’environnement à la fin du confinement : “Les émissions ont toujours tendance à rebondir, après une crise. […] Le climat a besoin d’une baisse soutenue et régulière des émissions de gaz à effet de serre, pas d’une année ‘blanche’« . écrit François Gemenne – chercheur et membre du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) – sur Twitter.
Pour que les bonnes nouvelles écologiques ne soient pas éphémères, plusieurs collectifs mettent toute leur énergie à réfléchir à “l’après”, pour permettre à la Terre de tourner rond.
- “L’alliance européenne pour une relance verte”, dont nous vous parlions la semaine dernière, rassemble 180 signataires (ministres, députés européens, ONG, entreprises) souhaitant mettre en place un plan économique durable en faveur de l’environnement et de la biodiversité.
- En France, la Convention citoyenne pour le climat, qui devait finaliser ses travaux début avril, a vu son calendrier retardé mais en a profité pour tenir une session spéciale début avril sur l’après confinement, et a pu transmettre à l’exécutif 50 propositions pour repenser le modèle économique : plus humain, plus vert, plus résilient.
- L’Académie du Monde d’Après rassemble des dizaines de personnalités engagées qui veulent donner à la Terre les moyens de respirer même après la fin du confinement.
- La plateforme Le jour d’après, lancée par une soixantaine de parlementaires, permet de recenser les idées des citoyens français pour une relance collective écologique et sociale. Une trentaine de propositions seront ainsi rédigées sous forme d’amendements ou propositions de lois.
Cette crise du coronavirus peut-elle insuffler un nouvel air – plus vert – sur l’économie mondiale ? La situation que nous vivons actuellement nous fait prendre conscience de notre impact sur la Terre de façon visible et concrète. C’est l’occasion ou jamais de repenser nos modèles économiques, sociaux et environnementaux pour voir la Terre en vert !
Texte : Jeanne Favas Crédits : The Week, A. Pardo/AFP, Aviator Photographer