Manger moins mais mieux”, “repenser sa consommation”, “remettre le végétal au coeur de l’assiette” : ces phrases, nous les entendons beaucoup à propos de la viande. Quand il s’agit du poisson et des produits de la mer, difficile de s’y retrouver dans l’océan des labels et initiatives se réclamant garants d’une pêche durable !
Nous avons interrogé Elisabeth Vallet, directrice d’Ethic Ocean, qui nous livre ses bonnes pratiques pour manger du poisson durablement :

Pouvez-vous nous dire deux mots à propos d’Ethic Ocean ? Quelles sont vos missions ?

Elisabeth Vallet :  » Ethic Ocean est une organisation environnementale qui œuvre pour la préservation des océans. Nous travaillons avec les professionnels de la filière pêche et aquaculture pour initier et accompagner la mise en œuvre de pratiques d’approvisionnement durables : pêcheurs, aquaculteurs, fournisseurs, grande distribution, poissonniers et restaurateurs.

Comment choisir un poisson ? Comment se repérer dans la jungle des labels ?


EV : Les éco-labels sont des outils servant à faciliter la lecture auprès des consommateurs, pour leur permettre de choisir des aliments qui ont été produits selon certains critères environnementaux. En général, ils vont dans le sens d’une démarche d’amélioration des pratiques en imposant des critères de durabilité. Ethic Ocean a publié un article sur le sujet.
Mais des poissons non éco-labellisés peuvent être également durables. Donc avec ou sans label, il est important de vérifier 3 principaux critères lors de l’achat de poissons ou fruits de mer :

  • Vérifier la provenance précise et l’état du stock : s’assurer que la ressource en poisson que l’on souhaite acheter n’est ni en danger, ni surpêché.
  • Se renseigner sur la technique de pêche : favoriser les pêches sélectives (ligne et hameçon, casiers, pêche à pied et plongée), qui ont un moindre impact sur l’écosystème.
  • Choisir en fonction de la taille de maturité : la loi autorise la commercialisation de poisson de taille parfois inférieure à la taille de maturité sexuelle.

il est important de ne pas systématiquement opposer pêche industrielle et pêche artisanale. Il y a des bonnes et des mauvaises pratiques partout. Les pêcheurs artisans peuvent avoir des pratiques ayant un impact sur les écosystèmes. Et des bateaux de taille industrielle peuvent, quant à eux, avoir des pratiques responsables.
Mais il est certain que plus le bateau a des capacités de capture importantes et adopte des pratiques de pêche peu scrupuleuses, plus les dégâts sur les écosystèmes marins seront colossaux et condamnables”.
Pour aider les professionnels à y voir plus clair, Ethic Ocean propose d’une part un guide des espèces, et d’autre part un poster détaillant les avantages et inconvénients de chaque technique de pêche. 

methodes peche ethic ocean
Les différentes méthodes de pêche / Ifremer

La saisonnalité des fruits et légumes est de plus en plus intégrée en cuisine. Qu’en-est-il des produits de la mer ? Y-a-t-il vraiment une saison pour les poissons ? 

EV : C’est un sujet complexe et très différent des fruits et légumes.  Un poisson de saison est un poisson que l’on trouve plus facilement en mer et sur les étals des poissonniers, car il est en période de reproduction, il se regroupe en banc pour frayer et est donc plus facile à capturer. En résumé, si les populations de poisson sont en bon état, nous pouvons le consommer toute l’année, même en période de reproduction. Si le stock est fragilisé, surexploité, sa consommation est à éviter, toute l’année, le temps de laisser le stock se reconstituer.
Je vous donne 3 exemples :

  • Le maquereau peut être consommé toute l’année. La période où il est le meilleur et le plus abondant est en début d’été, car il est plus gras et se prépare pour la reproduction. Si le stock est en bon état, et que les limitations de capture sont respectées, il n’y a aucune raison de ne pas le consommer à ce moment-là.
  • Les poissons plats (soles, limandes, turbots, barbue…) se reproduisent en début d’année. Toutefois, leur chair n’est pas la meilleure à cette période, car elle se délite plus, les femelles sont grainées (contiennent des œufs) et cela peut générer jusqu’à 30% de pertes en cuisine. Donc même si les stocks sont en bon état, évitons ce gâchis et laissons-les se reproduire – pour mieux en profiter le reste de l’année.
  • Le bar est très apprécié des cuisiniers et des particuliers, il a très longtemps été pêché sans aucun quota européen, allant jusqu’à une surexploitation très importante. Malgré de nouvelles contraintes légales, la ressource n’est toujours pas renouvelée. Il faut donc réduire le plus possible sa consommation de bar le temps que le stock fragilisé se reconstitue, et éviter à tout prix les mois de janvier à mars, où il se reproduit.

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Le cabillaud, les crevettes tropicales et le saumon représentent ¾ des achats de poisson en grande surface. Ce sont trois produits qui posent plusieurs types de problèmes environnementaux. Comment apprendre à cuisiner les espèces moins connues et dont la ressource est sauvegardée ?


La plupart des stocks de cabillaud (mais pas tous) souffrent de surexploitation. Il est important d’éviter les achats de lots provenant de populations affaiblies et de diversifier sa consommation de produits marins : tacaud, mulet, vieille, merlan, hareng, maquereau et bien d’autres espèces sont des alternatives originales que les professionnels peuvent proposer à leurs clients.
Les restaurateurs sont à l’interface entre l’amont de la filière (ils peuvent orienter les critères d’achat) et l’aval (ils peuvent sensibiliser les clients aux enjeux de durabilité). Ils ont un formidable rôle de prescripteur auprès des consommateurs, et doivent être conscients que leur action dans les cuisines peut changer les choses au fond des océans.
Il est important de former les équipes de salle et de cuisine, les informer sur l’état des ressources et de leur expliquer l’importance de cette démarche afin de fédérer les équipes autour de l‘engagement du restaurateur ; ainsi, ils pourront mieux expliquer au consommateur pourquoi certaines espèces ont disparu du menu, et valoriser certaines moins connues mais durables.
Chez Ethic Ocean, nous accompagnons les restaurateurs qui souhaitent s’approvisionner durablement, nous souhaitons accélérer cette prise de conscience afin de généraliser cette démarche auprès de tous les restaurateurs et tout acheteur professionnel en produits de la mer, qui ont la responsabilité d’offrir aux consommateurs des espèces qui ne sont pas en danger. Ainsi le grand public aura certainement envie de consommer du poisson différemment.  »

En conclusion, tout comme pour la viande, Ethic Ocean recommande de manger moins de poisson mais d’en manger mieux. “Modérons et diversifions notre consommation de produits animaux de manière générale.” prône Elisabeth Vallet, et comme pour le reste de notre alimentation, limitons le gaspillage qui représente, selon la FAO, pas moins de 27 % du poisson débarqué. Pour ne pas dériver et manger du poisson durablement, on adopte le trio : limiter, diversifier et ne rien gâcher ! 🐟 ♻️

Texte : Laurène Petit
Crédits : Jeremy Stewart, Sebastian Pena Lambarri et Ifremer

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